Matinales 1 : Itinéraire spirituel

 

En décrivant ici son chemin de libération, Jean Sulivan explicite la vision qui sous-tend ses livres.

Sa pensée se tient à distance des débats religieux contemporains : car elle est liée, dirait-on, plus à la sensation et à une expérience vitale qu'aux abstractions, sans pour autant nier la fécondité du concept et de l'idéologie... Il n'y a pas de crise. La prétendue déchristianisation n'est que la fin d'une illusion... Fin de la foi singularité contre la collectivisation et la quantification de l'esprit. Retour à l'art d'habiter son corps en traçant son chemin unique sur la voie commune : le seul moyen pour lui d'accéder à une fraternité réelle par-delà les fraternités déclarées et abstraites. Par le singulier concret à l'universel.

Si l'absolu existe, il est lié au sensible. L'invisible par le visible : ou alors l'Incarnation n'a aucun sens. Tout langage spirituel ne peut qu'être incarné dans une esthétique qui dit une respiration d'homme et porte ainsi sa " preuve " en lui-même. En cet ordre l'abstraction est trahison. Les gardiens de la source ont bien parlé de la source. Avec tous leurs mots, discours dans les sessions, séminaires, on pourrait paver toutes les routes de la terre. Mais la source n'habitait pas toujours leurs paroles.

La voix de Sulivan tour à tour dure et tendre, insolente ou humoristique, toujours allègre et amicale, invite à l'éveil : " Toute réalité est en vous, écrit-il pour ainsi dire d'un pays étranger et proche. Toute chose, bien ou mal, est pour votre création, pourvu que vous ne vous teniez pas hors du risque de la vie. Car hors de la vie il n'y a rien. Si ce souhait a un sens, que ce livre vous laisse cassés et misérables, si vous ne savez pas encore que vous l'êtes, pour une joie dont vous n'avez pas l'idée. "